1. De l’Élysée à Sainte-Hélène

Waterloo. 18 juin 1815, 21 heures 15.
L’armée française commandée par Napoléon Ier est défaite par les Britanniques, sous le commandement du duc de Wellington, et les Prussiens du général Blücher. L’empereur Napoléon, vaincu, prend à cheval la route de Paris.
Épuisé, ébranlé, il arrive le 21 juin au palais de l’Élysée, où l’attend sa deuxième défaite. Sous la pression des deux Chambres, il abdique en faveur de son fils, âgé de 5 ans. Il propose alors de redevenir simple général, pour protéger la France de l’invasion, mais le gouvernement provisoire constitué autour de Fouché, ancien ministre de la Police, lui indique la route de l’exil. Une petite suite se constitue en hâte autour de lui. Vêtements, vaisselle, argenterie sont empaquetés au hasard des trouvailles.
Ici commence le long chemin qui mène l’empereur déchu de Paris à Longwood House, sur l’île de Sainte-Hélène, en passant par Malmaison, l’île d’Aix et les côtes anglaises.

2. L’île prison

Les puissances européennes considèrent l’empereur déchu comme un prisonnier. La Grande-Bretagne est désignée responsable de sa garde, sous l’oeil de commissaires que doivent envoyer l’Autriche, la Russie, la Prusse et la France.
À 2 000 km au large de la côte ouest de l’Afrique et à 5 600 km de Buenos Aires, Sainte-Hélène est un choix parfait pour décourager toute tentative d’évasion.
Propriété de l’East India Company britannique, l’île accueille les navires marchands sur la route des Indes. La défense des côtes est renforcée et des unités militaires s’ajoutent à l’unique régiment de Sainte-Hélène. Pour le temps de la captivité de Napoléon, l’île sera gérée par un lieutenant général aux ordres directs du ministre anglais de la Guerre et des Colonies.
L’amiral Cockburn remplit cet office jusqu’à l’arrivée de sir Hudson Lowe, le 14 avril 1816.
Au début de l’exil, la presse et la caricature s’emparent de l’image que l’Empereur avait lui-même construite et à laquelle il est plus que jamais attaché, soulignant le contraste entre l’étroitesse de son nouveau domaine et son ambition sans limite.

3. Le domaine de Longwood, la dernière résidence

Pour loger le prisonnier, il ne peut être question de Plantation House, demeure du gouverneur. Le temps de préparer une habitation convenable, l’amiral Cockburn l’installe donc au domaine des Briars. Napoléon y occupe un pavillon exigu, mais bénéficie de l’accueil chaleureux des propriétaires, la famille Balcombe. Les facéties de leur cadette, Betsy, égaient un peu sa mélancolie.
Le 10 décembre, il emménage dans la ferme de Longwood, sur un morne plateau.
Là, le relief arrête les nuages pour en faire le point le moins ensoleillé et le plus humide de toute l’île. Le brouillard et le vent y dominent, même l’été. La seule vue sur la mer est rarement dégagée.
Des casernes sont bâties, contrôlant l’unique route. Pour quitter l’enceinte où il est libre de ses mouvements, Napoléon doit être accompagné d’un officier anglais. Il s’y refuse.
Il ne va pas non plus aux dîners du gouverneur, où il ne serait pas traité en Empereur. Quant aux courses de chevaux, grande distraction de l’île, il les regarde de loin, à la lunette.
Il laisse, autour de lui, l’espace se resserrer comme un étau.