Interview

Fabien Boully
Maître de conférences en cinéma et audiovisuel, Université Paris Ouest Nanterre La Défense

Quel a été votre rôle dans l’élaboration de l’exposition ?
Les commissaires ont souhaité que les rapports entre fiction et réalité soient un axe structurant de l’exposition. En 2011, j’avais programmé au musée de l’Armée un vaste cycle sur le cinéma de la  Guerre froide : L’Écran atomique. Ils m’ont donc demandé de penser la place du cinéma dans l’exposition, de participer au comité scientifique, de sélectionner les extraits de films et de séries qui  illustrent les grandes thématiques qui jalonnent le parcours et de concevoir les textes qui mettent en perspective ces extraits. J’ai aussi approfondi ce travail de réflexion aux plans historiques,  esthétiques et culturels dans le catalogue. J’ai donc été associé aux grandes étapes de la construction de l’exposition, pour que le cinéma traitant des guerres secrètes soit lui-même pleinement exposé, ce qui constitue l’une des belles originalités du projet. Parallèlement, il m’a été proposé de programmer un nouveau cycle de films : Objectifs secrets, qui est une manière, pour détourner la  citation célèbre de Clausewitz, de poursuivre l’exposition par d’autres moyens.

En quoi les représentations cinématographiques sont-elles indissociables du thème de l’exposition ?
Par définition, les guerres secrètes ont une part invisible et cachée. Les fictions cinématographiques trouvent dans cette zone d’ombre un terrain à investir pour dévoiler en images, de manière plus ou  moins réaliste, plus ou moins fantasmée, les opérations clandestines, les stratégies d’infiltration et les exécutions programmées qui forment le tissu des luttes non-conventionnelles. Bien souvent, les  dées que l’on se fait des guerres secrètes ont été en partie façonnées par le cinéma. C’est lui qui a contribué à donner des visages aux espions et à nous faire vivre de l’intérieur les actions de la  Résistance. Par le biais de ses intrigues, il a montré ce qu’ont de terrible, de violent et de tragique ces guerres, mais il a aussi fait d’elles un terrain de jeu absurde ou comique. En ce sens, le cinéma  ient aussi troubler notre rapport à la réalité de ces guerres. Or, c’est ce rapport complexe entre réalité et fiction que l’exposition veut mettre en évidence. C’est pourquoi le cinéma se devait d’y  ccuper une place importante.