L'ÉCHO DU DÔME - SEPTEMBRE/DÉCEMBRE 2013 #28

EXPOSITION - Du 16 octobre 2013 au 26 janvier 2014

INDOCHINE Des territoires et des hommes, 1856-1956

Cet automne, le musée de l’Armée organise une exposition sur 100 ans de présence militaire française en Indochine. Croisant les histoires de la France, du Cambodge, du Laos et du Vietnam, Indochine. Des territoires et des hommes, 1856-1956, propose au grand public d’appréhender la complexité et la richesse de l’époque coloniale de l’Indochine à travers l’action des militaires français.

Bataille de Son Tay, 1884. Tenture sur soie, 149 x 82 cm. Don de Jean Walter au musée de l’Armée, 2013.

Cette manifestation, conçue comme le second volet du diptyque ouvert en 2012 par l’exposition Algérie, 1830- 1962. Avec Jacques Ferrandez, traite de façon pédagogique et accessible les délicats processus de colonisation et décolonisation. 350 pièces jalonnent ses quatre parties : les premiers pas de la France au-delà de la route des Indes avant 1856, la formation de l’Indochine française de 1856 à 1907, le coeur de la vie coloniale de 1907 à 1939, le déclin et la fin de l’Empire français en Extrême-Orient. Cet ensemble de pièces réunies pour la première fois, diverses par leur nature, leur origine et leur itinéraire, fait de cette exposition un événement exceptionnel. L’importante collection du musée de l’Armée sur cette période, dont une partie n’a jamais été montrée, est ici mise en relation avec des peintures, des dessins, des extraits de journaux, des objets, des uniformes, des archives papier, photographiques et filmiques, provenant de collections particulières et de nombreuses institutions de référence dans ce domaine.

De l’action militaire à la mise en valeur du territoire

Le fait militaire y occupe une place structurante. D’une part, parce que des épisodes essentiellement militaires ouvrent et ferment le siècle qu’elle couvre ; d’autre part, parce qu’il n’est pas possible de dissocier le processus complexe de la découverte, de l’aménagement, de l’investissement puis de l’exploitation et de la mise en valeur du territoire colonial, des efforts nécessaires à sa conquête, à sa pacification ainsi qu’à sa défense, comme des moyens mis en oeuvre à ces fins. Les autres dimensions de la présence coloniale de ces hommes sur un territoire ne sont pas pour autant passées sous silence. Infrastructures routières, portuaires, industrielles, exploitation des ressources naturelles, urbanisme, architecture, éducation, culture, archéologie, vie quotidienne… autant de domaines influencés par la colonisation.

Une présentation conjuguant esthétique et rigueur

L’agence Klapisch-Claisse a conçu une scénographie esthétique, pertinente et originale, qui met en valeur les notions de territoire, de dynamique d’appropriation, de modélisation et de restitution. Une cartographie abondante permet de se projeter virtuellement dans l’espace indochinois. Ponctué de citations d’hommes politiques, de militaires et d’intellectuels français et indochinois fournissant des informations clés sur les événements et les évolutions institutionnelles, politiques et idéologiques, le parcours du visiteur est accompagné d’outils graphiques, signalétiques, audiovisuels et multimédias. Portée par une démarche scientifique rigoureuse, l’exposition s’attache à montrer la complexité des interactions entre les groupes sociaux, linguistiques, culturels, les rencontres ou les heurts, les rejets et résistances militaires autant que les adhésions, sachant que ces attitudes ne sont pas exclusives les unes des autres et qu’il convient de les cerner avec précision pour en mettre à jour les enjeux.

Lieutenant-colonel Christophe Bertrand, commissaire de l’exposition, département contemporain

Légionnaire du 1er bataillon étranger de parachutistes en tenue de saut, 1950.

« DONNER ENVIE AUX VISITEURS DE REVENIR »

David Guillet, directeur adjoint du musée de l’Armée, conservateur général du patrimoine, met en perspective l’exposition dans la programmation du musée.

Pourquoi proposez-vous des expositions temporaires ?

La rénovation achevée en 2010 a changé le visage du musée et accru sa fréquentation. L’enjeu est désormais de fidéliser nos visiteurs, parisiens, franciliens, et français en général, en leur offrant une programmation qui leur donne envie de revenir. Les expositions temporaires permettent d’explorer des périodes et des sujets que le parcours permanent aborde insuffisamment, voire pas encore. C’est le cas de l’histoire de la colonisation et de la décolonisation ou de la seconde moitié du XXe siècle.

Que pouvez-vous dire des sujets des expositions déjà réalisées ou en projet ?

Notre ambition est de ne rien nous interdire, ni les sujets chronologiques ni les sujets thématiques, et surtout de ne pas reculer devant la difficulté. Celle-ci est stimulante, impose de consulter les meilleurs spécialistes, de ne pas se laisser aller aux idées reçues. De plus, tout sujet, bien traité, a sa part d’actualité. L’exposition prochaine consacrée aux mousquetaires montre qu’ils ressemblent plus aux forces spéciales d’aujourd’hui qu’aux bretteurs mondains dont nous avons gardé la mémoire.

Comment caractérisez-vous la « ligne éditoriale » du musée ?

Elle repose sur trois exigences : l’accessibilité – notre programmation doit être comprise par tous ; la pédagogie – parce qu’il ne s’agit pas de livrer des faits historiques sans y apporter des clés de compréhension ; et, enfin, le souci d’équilibre – même lorsque nous traitons des événements douloureux ou abordons les figures tutélaires du musée, comme Napoléon Ier et Charles de Gaulle, nous nous attachons à éviter aussi bien le discours hagiographique que la critique systématique.

Qu’ont en commun les expositions que le musée a proposées à ses visiteurs ?

Sans aucun doute, la place de « l’autre ». Les soldats français et leurs chefs militaires ont, au fil des siècles, combattu aux côtés d’alliés contre des adversaires. Pour comprendre ces guerres et leurs enjeux, il faut les confronter aux différents regards portés sur elles. Nous devons offrir au public du musée – largement composé de visiteurs venus d’autres pays d’Europe et du monde entier – le visage de « l’autre », ennemi ou ami d’hier.

Plan vietnamien d’Hanoï, anonyme, datant du XIXe siècle.

« PARCOURS INDOCHINOIS… »

De la création du mythe d’Angkor, aux dessins et estampes des artistes de l’école des Beaux-Arts de Hanoï à l’histoire de la France en Indochine, il n’y a qu’un… billet, ou presque. Le musée de l’Armée, le musée Guimet et le musée des Années 30 de Boulogne- Billancourt proposent, en cette rentrée 2013, une saison indochinoise. Une entrée à tarif réduit sera offerte aux visiteurs sur présentation d’une preuve de visite dans l’une des expositions partenaires. Cette billetterie couplée permettra aux visiteurs de réaliser un vrai « parcours indochinois ».

Parachutage sur Diên Biên Phù.