Collections
Réglette de correction d’artilleur de la Grande Guerre
Les collections du musée de l’Armée se sont enrichies d’une réglette destinée à corriger les écarts en portée et en direction des tirs d’artillerie. Grâce à ce don d’un collectionneur privé, c’est un instrument d’artillerie peu banal qui est entré dans les collections du musée.
Pour régler un tir d’artillerie, le chef de pièce utilise les tables de tirs fournies par le ministère de la Guerre, calculées à partir d’un climat tempéré et sec, un vent nul et un obus de charge moyenne. Or, l’artillerie est amenée à tirer lorsqu’il pleut, qu’il vente et/ou que les températures sont très basses ou, au contraire, très élevées ; et la précision du tir peut être altérée par ces conditions météorologiques particulières.
Au début de la Première Guerre mondiale, les services de l’artillerie sont peu équipés en instruments d’observation et de mesure des données météorologiques. C’est pourquoi, à partir de février 1915, les artilleurs, mais également les militaires servants dans l’aviation, la marine et le génie (alors en charge de l’emploi des bombonnes de gaz asphyxiants), réclament la création d’un service météorologique capable de leur fournir soit des données soit des instruments permettant d’optimiser leurs actions.
Cette demande aboutit en octobre 1915 à la création du bureau météorologique militaire, rattaché au Service géographique de l’armée. Ce bureau se voit confier plusieurs missions, parmi lesquelles la mise en place d’un réseau d’observation météorologique sur l’ensemble du front, la conception et la fourniture d’instruments de mesures adaptés, la formation de météorologistes et, surtout, l’amélioration des techniques de prévision du temps.
Ce bureau va alors concevoir des outils permettant aux artilleurs de modifier les réglages de tir en fonction des données météorologiques recueillies. Cette réglette permet ainsi de corriger les écarts de trajectoire des projectiles en fonction des paramètres suivants :
– La pression atmosphérique, qui agit sur la portée en faisant varier la densité de l’air ;
– La température, dont les variations modifient la densité de l’air et la vitesse initiale du tir ;
– Le vent, dont la vitesse et la direction peuvent influer sur la portée et la direction prises par l’obus ;
– Le poids de l’obus, car deux obus du même modèle n’ont pas toujours exactement le même poids, notamment lorsqu’ils sont fabriqués par des manufactures différentes. Un système de marquage (cinq types allant de L, pour très léger, à ++++, pour très lourd) permet de prendre en compte le poids de chaque obus dans le calcul des trajectoires.
Cette réglette n’est pas une production du bureau météorologique militaire : les réglettes officielles sont fabriquées en carton contrecollé imprimé et portent la mention « Service géographique de l’armée – Bureau météorologique ». Il s’agit vraisemblablement d’une réalisation artisanale, fabriquée par un artilleur à partir d’une réglette officielle.